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mercredi 4 mai 2011

Affaire Guérini : des marchés publics confiés au grand banditisme

SOURCE MEDIAPART
Les gendarmes ont perquisitionné mardi 3 mai les locaux du conseil général des Bouches-du-Rhône, ainsi que l'office HLM 13 Habitat et, le 2 mai, la société d'économie mixte (Sem) Treize Développement, deux organismes dépendant du département. Ces perquisitions tombent au beau milieu des auditions menées le 3 et 4 mai à Marseille par la commission d'enquête du PS sur la fédération des Bouches-du-Rhône, jusqu'alors dirigée par le président du conseil général, Jean-Noël Guérini.

Jean-Noël Guérini réélu à la tête du CG13 en avrilLe conseil général avait déjà été perquisitionné en novembre 2009 dans le cadre de la même information judiciaire sur des marchés publics possiblement truqués, menée par le juge marseillais Charles Duchaine. Dans cette affaire, Alexandre Guérini, patron de décharges et de déchetteries dans les Bouches-du-Rhône et frère du président du conseil général, a été mis en examen et incarcéré début décembre 2010.

Les enquêteurs semblent cette fois s'intéresser aux nombreux marchés publics attribués par le Conseil général et ses satellites à plusieurs entreprises proches de Bernard Barresi, arrêté avec les frères Campanella en juin 2010 sur un yacht de la Côte d'Azur, après dix-huit ans de cavale. Condamné par contumace en novembre 1994 à vingt ans de réclusion pour l'attaque d'un fourgon blindé près de Mulhouse, Bernard Barresi a été mis en examen en juin 2010 pour, entre autres, exploitation de jeux de hasard, blanchiment, extorsions de fonds et association de malfaiteurs en vue de la commission de faits de vol avec arme, et incarcéré dans la foulée.
Au croisement des enquêtes du juge Charles Duchaine sur les marchés publics de Haute-Corse et des Bouches-du-Rhône et de celle du juge Philippe Dorcet sur le grand banditisme, les soupçons se focalisent notamment sur ABT, une société de BTP créée en 2001. Ses cogérants, Patrick Boudemaghe et Damien Amoretti, tous deux mis en examen dans l'affaire des marchés truqués corses, étaient proches d'Alexandre Guérini, qui avait fait appel à eux pour des travaux à la décharge du Mentaure (La Ciotat). Avec fausses factures et évasion fiscale des profits vers des comptes à l'étranger à la clef.

Damien Amoretti, à qui Alexandre Guérini a reconnu vouer une «affection particulière», a été de 2006 à 2007 l'unique associé de la SMA Développement, une des sociétés d'Alexandre Guérini actionnaire pour moitié de la SMA Vautubières, qui exploite la très lucrative décharge de La Fare Les Oliviers. Alexandre Guérini a par ailleurs affirmé au juge Duchaine avoir fait la connaissance de Patrick Boudemaghe au début des années 2000 lors de travaux de maçonnerie dans sa cossue villa marseillaise (appartenant officiellement à sa compagne).
Damien Amoretti et Patrick Boudemaghe étaient par ailleurs en contact régulier avec Bernard Barresi. Ce dernier, de retour dans la région marseillaise depuis janvier 2010 et se sachant sur écoutes, appelait Patrick Boudemaghe, alors installé en Espagne pour affaires, depuis des cabines téléphoniques afin de régler les affaires courantes.
«Mon argent, je le gagne sur les travaux et les commissions que je prends aux artisans et aux sociétés que je fais travailler, lorsque je suis le chantier», a expliqué Bernard Barresi le 3 mars 2011 au juge Philippe Dorcet. Ces chantiers sur lesquels Bernard Barresi prélevait sa «commission» étaient pour la plupart financés par des collectivités territoriales.

Le chiffre d'affaires d'ABT (20,5 millions d'euros cumulés entre 2005 et 2008), qui a employé selon les enquêteurs jusqu'à 66 personnes, dépendait en effet quasi exclusivement de marchés publics obtenus avec les collectivités locales des Bouches-du-Rhône.

Le plus souvent, ces marchés n'étaient pas passés directement par le Conseil général mais par des organismes publics satellites, présidés par des fidèles de Jean-Noël Guérini et où son frère Alexandre avait ses entrées: Treize Développement, le maître d'ouvrage des grands projets immobiliers du département, le service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône (SDIS 13), l'office HLM du département Treize Habitat, le syndicat mixte de l'Arbois en charge du développement d'un technopôle dédié à l'environnement sur 205 hectares au sud d'Aix-en-Provence (respectivement présidés par les conseillers généraux PS, Antoine Rouzaud, Jean-Pierre Maggi, Jean-François Noyes, Alexandre Medwedovski), etc.

En 2006, c'est ABT qui est choisi pour construire le centre de secours de La Ciotat (SDIS 13), puis la gendarmerie d'Orgon pour un montant de 1,8 million d'euros (Treize Développement) et qui assure le gros œuvre de la construction de la cantine d'un collège marseillais (Treize Développement). En juin 2007, nouveau jackpot, ABT remporte trois lots pour la construction d'un bâtiment sur le technopôle de l'Arbois, pour un montant de plus de 1,6 million d'euros.

En 2008, ABT réaménage pour le Conseil général le club senior marseillais de Saint-Jérôme pour 143.000 euros. En février 2009 le bailleur social 13 Habitat lui confie des travaux d'entretien sur des HLM (Arles-Port, Saint Louis du Rhône-Miramas-Martigues) pour 232.426 euros. «Nous n'avions pas à l'époque connaissance les doutes qui peuvent aujourd'hui exister sur ces sociétés, explique Bernard Escalle, directeur de l'office HLM et de sa commission d'appel d'offre. Dans la mesure où un dossier est conforme administrativement (la société candidate s'engage à déclarer ses salariés, paie ses cotisations Urssaf, etc.), nous faisons l'analyse des offres et nous n'avions aucune raison d'écarter à priori telle ou telle société, cela pourrait même nous être reproché.» Mais peut-on encore plaider la malchance et l'ignorance quand on sait qu' Alexandre Guérini, qui était comme chez lui à 13 Habitat, y avait, entre autres, obtenu en septembre 2009 un logement pour l'ex-compagne de Bernard Barresi sur un simple coup de téléphone ?

En liquidation judiciaire depuis novembre 2010, la société ABT était domiciliée à Gardanne, au 835, Petit Chemin d'Aix, un des lieux de planque de Bernard Barresi, qui hébergeait aussi Alba Sécurité, la société de gardiennage de sa compagne Carole Serrano. Alba Sécurité, qui a été perquisitionné mardi 3 mai par les gendarmes, avait également les faveurs du conseil général.

L'entreprise assurait le gardiennage des archives départementales de Marseille pour 300.000 à 1 million d'euros par an (avril 2006), du centre Afpa de Marseille-Saint Jérôme pour 40.000 euros (octobre 2007), de chantiers et cités HLM de 13 Habitat pour 1 million d'euros (juin 2008) et de plusieurs sites du conseil général pour 4,2 millions d'euros (marchés attribués en novembre 2008 et août 2009). Pour la petite histoire, Alba Sécurité fournissait également les soirs de match des centaines de stadiers au Vélodrome géré par la Ville de Marseille.

Comment ces sociétés liées au grand banditisme ont-elles pu obtenir autant de marchés publics de la part d'organismes dépendant du conseil général des Bouches-du-Rhône? «Tout le monde utilisait ces sociétés le plus normalement du monde : elles avaient des marchés avec nous, avec le conseil général, avec Marseille Provence Métropole et même avec la Ville de Marseille, dit Jean-François Noyes, l'ancien président de l'office HLM du département. Ces personnes écumaient la région». Celui qui a cotoyé à plusieurs reprises Carole Serrano, lorsqu'il s'occupait des questions de séccurité au conseil général, dit être «tombé des nues» en apprenant qu'elle était la compagne d'un bandit en cavale.

Ancien directeur général des services du conseil général, Vincent Potier avait lui pointé, lors de son audition par les gendarmes en novembre 2009, le «court-circuitage en provenance du cabinet» de Jean Noël Guérini sur ces «outils extérieurs au Conseil général» et les dérives en résultant. Pour nombre de ses gros investissements immobiliers, notamment en matière de construction-rénovation de collèges, le conseil général donnait ainsi mandat à la Sem Treize Développement, créée en 2002, afin de préparer les appels d'offres, choisir les jurys d'architectes et mener les travaux. «‪Concernant Treize Développement, on nous faisait comprendre qu'en le choisissant comme support technique, on obtiendrait des subventions», témoigne aujourd'hui Corinne Lucchini‬, conseillère municipale UMP à Rognac et ancienne vice-président de la communauté d'agglomération Agglopole Provence, à l'ouest des Bouches-du-Rhône.
Magazine de l'Arbois de début 2006L'ex-directeur de la Sem Treize Développement Jean-Marc Nabitz, proche d'Alexandre Guérini, est aujourd'hui introuvable (certains le disent en Israël). «Je ne l'ai plus eu au téléphone depuis deux ans», confirme Patrick Mennucci, le maire PS du 1e-7e arrondissement de Marseille, qui était, jusqu'en 2008, employé de Treize Développement.

Patrick Mennucci s'occupait pour la Sem de la commercialisation de la ZAC du Domaine de la gare, aux abords de la gare TGV d'Aix-en-Provence. Il dit aujourd'hui découvrir l'obtention en 2007 par ABT d'un marché public sur une autre zone du technopôle (le petit Domaine de l'Arbois) pour la construction d'un bâtiment.

Jean-Marc Nabitz, qui s'occupait déjà de déchets lorsqu'il était directeur général adjoint du conseil général au début des années 2000, a joué, à la tête de Treize Développement, un rôle primordial dans l'élaboration du plan départemental d'élimination des déchets ménagers de 2006. Plan qui insistait sur le développement de la méthanisation dans le département comme une alternative à l'incinération. D'après les conversations interceptées par les gendarmes, Alexandre Guérini n'hésitait pas à faire appel à ses compétences pour obtenir des précisions techniques sur l'incinérateur de Fos-sur-Mer, grand concurrent d'un projet de méthanisation qu'il voulait monter avec l'intercommunalité San Ouest Provence.

Plus compromettant encore, en juillet 2009 Jean-Marc Nabitz a obtenu, par son entreprise de conseil 3N Concept, un marché de l'Agglomération d'Aubagne pour assurer la maîtrise d'ouvrage d'un nouveau projet d'extension et de création d'un centre de tri sur la décharge du Mentaure. Une décharge exploitée par une société d'Alexandre Guérini et dont le Conseil général avait préempté une partie du terrain dans des conditions ahurissantes révélées par La Provence.

Le 24 novembre 2004, la commission permanente du conseil général lançait la préemption d'un terrain adjacent à la décharge au nom de «la préservation de la qualité des sites, des paysages et des milieux naturels» et, dans la foulée, accordait une subvention de 2,5 millions d'euros pour «la création d'un centre de stockage des déchets ultimes à La Ciotat» sur ce même terrain. Deux délibérations pour le moins contradictoires!

Jean-Noël Guérini a-t-il senti le vent tourner pour Treize Développement? En juillet 2010, le président du Conseil général a fait voter, en toute discrétion, la création d'une société publique locale (le nouvel outil des collectivité locales) Terra Treize, à qui a depuis été confiée la maîtrise d'ouvrage de travaux dans quatre collèges du département. Un tâche habituellement réservée à la Sem Treize Développement.

Grâce à un groupement d'intérêt économique, les moyens matériels et humains des deux sociétés ont été mutualisés. Même mission, mêmes moyens, mêmes acteurs (on retrouve l'ex-conseiller général Antoine Rouzaud, ex-président de Treize Développement, à la tête de Terra Treize), la création de cette SPL est-elle une façon d'enterrer discrètement la Sem Treize développement, suspectée de favoritisme par la justice? Pas de réponse du côté de Treize Développement dont l'ex-président Antoine Rouzaud (l'un des deux conseillers généraux socialistes marseillais non réélus aux cantonales de 2011) est injoignable.
«On est dans un fonctionnement où les choses sont toutes décidées au cabinet de Jean-Noël Guérini et nous ne sommes pas associés à la gestion, estime Maurice Rey, le seul conseiller général d'opposition membre du conseil d'administration de Treize Développement et Terra Treize. Je trouve anormal qu'une société comme ABT ait, selon La Provence, eu autant de marchés, à hauteur du quart du budget de Treize Développement entre 2005 et 2008 et que son ex-directeur, Jean-Marc Nabitz, ait aujourd'hui disparu.»

A 13 Habitat, autre institution perquisitionnée par les gendarmes, le changement de président après les cantonales de 2011 n'a pas révolutionné les mœurs. Malgré des demandes répétées, aucun élu d'opposition ne participe au conseil d'administration, jusqu'ici présidé par le conseiller général PS Jean-François Noyes, ancien directeur de cabinet de Jean-Noël Guérini.

En janvier 2011, Jean-François Noyes justifiait les nombreuses interventions d'Alexandre Guérini dans la gestion de l'office en invoquant l'histoire familiale : «Le père d'Alexandre Guérini a fait toute sa carrière à l'office, son frère a été président de l'office pendant dix ans et lui-même a travaillé pour l'Opac, il a d'ailleurs toujours des marchés à l'Opac, dont un pour débarrasser les communs et les caves, je crois. (...) Alexandre Guérini connaît beaucoup de monde à l'Opac, certains depuis 25 ans, et il a des amis qui souhaitent lui faire plaisir.»
Sans surprise, le nouveau président de 13 Habitat, le conseiller général Christophe Masse, émarge lui au fan club d'Alexandre Guérini sur Facebook.

source MEDIAPART

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